“Je pense que la cuisine est beaucoup plus difficile que la Légion étrangère” : entretien avec Miguel de Top Chef

“Je pense que la cuisine est beaucoup plus difficile que la Légion étrangère” : entretien avec Miguel de Top Chef

Image :

(© Julien Theuil/M6)

photo de profil

Par Damien Garcia

Publié le

De sa découverte de la cuisine au Mexique à ses projets d’avenir, on revient sur son parcours culinaire.

Né au Mexique, Miguel tient sa passion culinaire de son grand-père. Enfant, il cuisinait déjà pour ses frangins, et c’est au fil des tiramisus ratés qu’il affine sa technique. Issu d’une famille modeste, il décide de s’engager dans la Légion étrangère pour cuisiner en Europe. C’est à la suite d’une blessure au dos qu’il atterrit en France. Un pays qu’il affectionne particulièrement, puisqu’en grandissant, Miguel développe un intérêt pour la gastronomie française, qu’il apprend à sublimer, sans jamais oublier ses origines mexicaines.

À voir aussi sur Konbini

Après un passage en tant que chef de partie au Marguerite Bocuse, puis au Bistrot d’Abel, à seulement 26 ans, il devient chef à l’Astra. C’est après la fermeture de ce dernier qu’il revient au Bistrot d’Abel en tant que sous-chef.

Éliminé prématurément, le candidat regrette de ne pas avoir eu le temps de montrer l’étendue de son univers culinaire. Miguel revient avec nous sur ses regrets, sa vision de la cuisine et ses projets futurs.

Konbini | Ça fait quoi de se voir à la télévision ?

Miguel | C’est une première, mais je n’arrive toujours pas à me regarder. Hier, j’ai regardé pour la première fois l’épisode 1. Ça me fait bizarre, c’est étrange. Après, ça reste sympa de se voir à la télé, c’est un peu un accomplissement. Ce n’était pas un objectif, mais au moins, avant de mourir, je pourrais dire : “Ouais, je suis passé à la télé”.

Qu’est-ce qui t’as amené à participer à l’émission ?

C’était surtout pour échanger avec les autres candidats et prendre confiance en ma cuisine. Que les chefs me disent si c’est bien ou pas ce que je fais, et surtout pour évoluer dans ma carrière professionnelle. Mais la télé passait vraiment en dernier.

Tu avais une petite appréhension en arrivant sur le tournage ?

Oui, c’était super angoissant, tu sais que tu vas passer devant toute la France. Il y a des gens qui ne te connaissent pas, tu ne sais pas comment ils vont réagir face à ta personnalité. Je me suis dit que j’allais être moi-même, comme tous les jours au resto, s’ils ne m’aiment pas, ils ne m’aiment pas, s’ils m’aiment, ils m’aiment, je m’en fous [rires]. Ce qui me faisait le plus peur, c’est qu’ils me fassent la misère sur les réseaux, parce qu’aujourd’hui ça va vite, un mot de travers et c’est fini pour toi.

Comment ça s’est passé avec les candidats ? Il y en a certains qui te faisaient peur ?

Franchement non, on arrive à l’hôtel trois, quatre jours avant le premier tournage, on a le temps de faire connaissance. Il y en a certains qui se connaissaient déjà, comme moi, Danny et Hugo. On est là, on se partage nos histoires, nos recettes. Il n’y a pas vraiment de rivalité entre nous, on pense à nos recettes avant de penser aux autres.

Comment es-tu arrivé dans la cuisine ?

C’est depuis que mon grand-père a semé cette petite graine de l’amour pour l’art culinaire. Depuis ce moment-là, j’ai voulu cuisiner. J’avais neuf ans quand j’ai commencé à cuisiner pour mes frères et sœur. C’est là que j’ai réalisé que c’est le rêve de devenir cuisinier qui me faisait tenir. Parce que dans ma famille, on a traversé des situations difficiles. C’est cette passion qui m’a motivé à partir du Mexique pour rejoindre un endroit dans lequel je pourrai vivre de ma cuisine.

À neuf ans tu cuisinais pour tes frères et sœur, tu étais déjà doué ?

Non pas du tout, j’étais une grosse merguez [rires]. Je me rappelle, j’ai raté tellement de fois le tiramisu. J’en avais trop marre de payer pour réessayer d’en faire un. En plus, le mascarpone c’est hyper cher au Mexique. J’arrivais dans le magasin je me disais : “Putain, encore 50 pesos pour du mascarpone”. Heureusement, au bout d’un moment, je le faisais parfaitement et mes frères et sœur adoraient. En fin de compte, ce temps et cet argent investis ont porté leurs fruits.

Tu la définirais comment, ta cuisine ?

Elle est typiquement lyonnaise, pleine de goût, de saveurs franches et assez rustiques. Parfois, j’essaye d’être fin dans mes dressages, mais je n’ai pas encore la main pour que ça soit exactement comme je le voudrais. Donc je préfère rester dans quelque chose de rustique avec des goûts très marqués, délicats mais pas trop. C’est une cuisine française bourgeoise influencée par mes savoirs mexicains.

Je ne suis pas un cuisinier mexicain qui est venu apprendre la cuisine française. Je suis un Mexicain qui cuisinait déjà français. Toutes les saveurs et les associations que je peux faire viennent de mes souvenirs, quand à 17 ans je mangeais des tacos après une soirée, ou quand le dimanche j’allais manger de la barbacoa et de la birria avec mes parents. C’est ça qui rend ma cuisine lyonnaise atypique. Je la saupoudre d’amour, de piment et de coriandre.

Comment as-tu réagi après qu’Hélène Darroze t’a annoncé que tu rejoignais la brigade cachée ?

J’étais heureux, mais vu que c’était un truc auquel je ne m’attendais pas du tout, à ce moment-là, j’avais le moral à zéro à cause de mon élimination. C’était très cool cette nouvelle, mais j’avais tourné la page Top Chef, je n’étais plus dans le même mood.

Ça fait quoi de passer de la Légion étrangère à la cuisine ?

On ne dirait pas, mais il y a beaucoup de points communs. La rigueur reste la même, je me lève presque aussi tôt, tu as un chef, il y a des échelons à respecter, il faut être rapide. Honnêtement, je pense que la cuisine est beaucoup plus difficile que la Légion étrangère. À la Légion, tu fais ce que te dit ton chef et basta. Dans la cuisine, en plus des performances physiques et de la fatigue, il faut être un minimum créatif, artistique, des critères qu’on ne retrouve pas dans la Légion. Pour moi, c’était plus difficile de commencer la cuisine que la Légion. Je viens d’une famille de militaires, c’était dans mes gènes.

Comment tu arrives à gérer le stress pendant les épreuves ?

Je n’ai pas réussi à gérer mon stress, justement. Quand je suis stressé je me précipite, et c’est ce qu’il s’est passé durant l’émission. Je me suis pressé pour en finir le plus vite possible avec ces situations de stress. C’était ma cuisine, c’étaient mes idées, mais je ne les ai pas exécutés comme je le voulais.

Il y a des choses que tu aurais voulu montrer mais que tu n’as pas eu le temps de faire ?

Oui, clairement. Je voulais arriver à la guerre des restos pour faire une taquería avec Jacques et Carla, c’est des amoureux de la cuisine mexicaine. J’avais une idée pour les quarts de finale aussi. J’aurais voulu imposer aux autres candidats un pâté en croûte aux saveurs exotiques, à faire en 2 h 30, avec trois farces différentes. Un truc chaud patate, ça aurait été trop cool.

Tu tires quoi de ton expérience Top Chef ?

Grâce à la visibilité, les gens ont vu de quoi j’étais capable. Ils ont vu mon univers, et maintenant, je suis plus sollicité. Ça m’a ouvert des portes. Je ne m’y attendais pas mais je le reçois à bras ouverts.

C’est quoi la suite pour toi ?

Il y a un petit paquet de projets, mais rien de concret. Je commence à peine à avoir des entretiens. Actuellement, j’aimerais faire un truc un peu baroudeur à Lyon, faire de la cuisine vraiment sauvage, dans des situations réelles, en forêt par exemple.