Mamayo et les joueurs du quai de Jemmapes redonnent ses lettres de noblesse au street basket français

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Mamayo et les joueurs du quai de Jemmapes redonnent ses lettres de noblesse au street basket français

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© Mamayo75

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Par Abdallah Soidri

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Le basketteur Mamayo s’est fait un nom en partageant sur TikTok ses exploits et ceux de ses amis sur le terrain de Jemmapes. Depuis, le playground est devenu the place to be.

À Paris, le terrain de basket le plus hype du moment ne se trouve pas à Carpentier (13e), à Porte de Charenton (12e), aux pieds de la tour Eiffel (7e) ou à Stalingrad sous le métro aérien (19e). C’est sur les bords du canal Saint-Martin, sur le quai de Jemmapes, dans le très bobo 10e arrondissement, que se déroule pourtant la révolution du streetball français.

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En tête d’affiche de ce mouvement, Mamayo (Mamayo75 sur les réseaux sociaux). Sur TikTok, ce joueur est l’un des influenceurs basket les plus suivis en France, avec plus de 114 000 followers. Quotidiennement, il poste des vidéos de ses actions et des matches se déroulant sur ce terrain, où gestes spectaculaires et trash-talk se côtoient. Le succès de ses publications lui a non seulement permis d’acquérir une certaine notoriété, mais aussi de mettre en avant le playground de Jemmapes au style si particulier avec ses deux arbres en plein milieu.

Les gens viennent de partout jouer à Jemmapes

En ce jeudi de début du mois d’août, alors que le soleil a fait son retour dans le ciel parisien, rendez-vous est pris avec Mamayo pour en savoir plus sur sa success story et celle du terrain. Dès notre arrivée, notre hôte est engagé dans un match contre deux gaillards qui, visiblement, ne viennent pas de notre chère contrée. Gato, un des tauliers de Jemmapes et un des quatre administrateurs des comptes Instagram et TikTok du terrain, nous apprend que nous assistons à un match France–États-Unis.

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“Il y a souvent des Américains qui viennent sur le terrain”, nous dit-il. Les deux New-Yorkais opposés à Mamayo et son coéquipier Aziz ne sont donc pas une exception. À vrai dire, ils sont beaucoup à venir des quatre coins de la région, du pays et de la planète pour se mesurer aux joueurs vus sur TikTok. Un indicateur parmi d’autres de la popularité acquise par le playground de Jemmapes et son représentant le plus connu.

Une exposition internationale jusqu’aux États-Unis

“Cela fait plus de dix ans que je joue ici. Mais ça fait trois ans que j’ai commencé à faire des vidéos pour montrer mes propres actions et celles du terrain”, raconte Mamayo. Le buzz arrive très vite après avoir posté une vidéo “pour rire” de son ami “Simon qui se fait prendre la balle par un papy. Le lendemain, elle était déjà à 100 000 vues sur TikTok”. Voilà pour le point de départ.

“Ensuite, je mets deux, trois vidéos de moi, et ça cartonne aussi. Donc, je me lance dans le truc.” Et ça fonctionne. “J’ai été relayé sur les grandes pages françaises de basket. CourtCuts a été la première, puis Overtime et Hoopsider. Après, boom ! Je commence à être relayé par les gros comptes américains : @houseofhighlights, @ballislife, ESPN. J’ai tout fait”, nous explique-t-il, preuve à l’appui en nous montrant son téléphone.

TikTok money et popularité partagée

La machine est en route. Le terrain du quai de Jemmapes et Mamayo commencent à se faire un nom, si bien que ce dernier est aujourd’hui affilié à l’agence Smile, qui s’est spécialisée dans la représentation des créateurs de contenu. Sa visibilité ruisselle sur ses autres camarades de jeu, comme Yannis, Keba, Jamal ou Simon, facilement identifiable sur les vidéos grâce à ses chaussures bicolores.

@mamayo75 Dites moi 😂 @6mon_jmp144 #basketball #streetbasketball #pov #foryou #trashtalk #paris #streetball ♬ son original - Mamayo75

“Ça nous apporte plein de choses”, et pas que des vues sur les réseaux sociaux, reconnaît l’influenceur. Quand on lui demande si ses vidéos lui rapportent de l’argent, il répond sans tourner autour de l’arceau : “TikTok, ça marche. Je ne me plains pas. Disons que je touche un petit salaire”, révèle-t-il, tout en précisant qu’il “travaille aussi à côté”.

Des revenus auxquels il faut ajouter ceux des tournois. Rien que sur le mois de juillet, lui et son équipe en ont disputé “entre dix et quinze”. Une activité “rentable”, de son propre aveu. C’est aussi lors de ces compétitions qu’ils mesurent l’importance de ce qu’ils réalisent à Jemmapes. “On arrive et on entend : ‘Ah c’est l’équipe TikTok.'”

“J’ai ramené un truc dans le streetball français”

Avec le succès de sa propre page et celui montant du compte @le__144 dédié au terrain du 144 quai de Jemmapes, le basketteur passé par le National 3 se voit comme un précurseur. “J’ai l’audace de dire que j’ai ramené un truc dans le streetball français”, affirme celui qui ne jure que par cette discipline. Il enchaîne : “Avant, il n’y avait aucun contenu comme le nôtre. Maintenant, j’en vois beaucoup sur les réseaux. Aujourd’hui, je vois beaucoup de vidéos où ça se trash-talk, mais avant, on ne voyait pas ça.”

@mamayo75 Trashtalk @𝕭.𝕾.𝕶🐍 @scary @Akaza ㊗️🉐 @_Izmo.93 😂 #pov #basket #paris #fyp #basketball #trashtalk ♬ son original - Mamayo75

Le fait de s’invectiver en plein match, c’est selon lui ce qui fait tout le charme de ses vidéos. Un aspect du jeu qui “avait un peu disparu en Europe”, estime Gato. “On n’est pas des pros, il faut qu’on se chamaille un peu, ça fait du bien. Et ça marche sur les réseaux”, justifie pour sa part Mamayo. “Le terrain a toujours été comme ça. Il n’y a aucune mise en scène.”

Les touristes pris de passion

Ce jour-là, alors que l’une des trois rencontres face aux Américains bat son plein, des badauds s’arrêtent pour admirer le spectacle. Ils s’écrient après un panier à trois points de Mamayo, un dunk de Yannis ou une finition tout en finesse d’un des New-Yorkais, et rigolent quand des bons mots s’échangent sur le terrain. Plus tard, une famille de touristes (un couple et leur fils) ne rate rien du match en cours. Ils resteront une bonne demi-heure.

“C’est les vacances en plein mois d’août, mais dis-toi que normalement, c’est blindé de monde”, nous indique Gato. “Sur la rue, au bord du canal, les gens s’arrêtent et regardent.” La rançon du succès.