Écouter MGMT aujourd’hui, c’est comme entrer dans sa chambre d’adolescent·e, nichée chez nos parents, avec tous nos posters et nos journaux intimes laissés là où nous les avions abandonnés, dans le deuxième tiroir de la table de chevet, sous le vieil ordinateur qui passait en boucle Empire of the Sun, Metronomy et Passion Pit. C’est comme écrire une lettre aux adolescent·e·s que nous étions. C’est comme se plonger dans les mélodies qui nous ont bercé·e·s durant l’enfance.
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Ça nous ramène à MySpace, ça nous ramène à Skyblog, ça nous ramène aux prémices du micro-blogging, à toute cette partie de l’histoire d’Internet qui se passait d’algorithmes et qui était construite autour de communautés réunies de manière organisée autour du partage, rien que du partage, sans trop d’hostilité. Parce que oui, écouter MGMT, c’est aussi se prendre en pleine gueule un douloureux constat : nous avons collectivement vieilli, nous, les enfants né·e·s dans les années 1990.
“Kids”, “Time to Pretend”, “Weekend Wars”, “Electric Feel”, “The Youth”, “Congratulations”… Quiconque ayant écouté ces hits sortis entre 2008 et 2010 comprendrait la nostalgie qui nous a gagné·e·s quand nous avons appris la sortie de leur nouvel album. Oracular Spectacular (2008) et Congratulations (2010) sont les deux albums de leur discographie que nous portons comme des amulettes dans nos cœurs.
Puis, le groupe – composé à l’origine d’Andrew VanWyngarden et de Ben Goldwasser – s’est fait plus rare : il a sorti MGMT en 2013 et Little Dark Age en 2018. Je corrige : en réalité, le duo ne s’est pas fait plus rare, c’est juste que nous étions occupé·e·s à écouter autre chose, à grandir, probablement. En 2018, on parlait déjà d’un “grand retour” et six ans après, MGMT a quitté Sony/Columbia Records, a signé dans le label indépendant Mom + Pop Records et sortait Loss of Life, et on ne cessera jamais d’évoquer, pour eux, de “grands retours”.
On ne vous cache pas qu’entendre à nouveau la voix d’Andrew VanWyngarden, après l’avoir abandonnée en 2010 dans notre chambre d’ado ne nous émeut pas qu’un peu. Ici, on entend l’acoustique de Congratulations et l’électro-psychédélique d’Oracular Spectacular. C’est rassurant : les meubles n’ont pas été déplacés.
On entend également quelques accents brit pop/pop rock des années 2000, un peu d’Oasis, d’Arcade Fire mais aussi du glam rock des années 1980 et du… Elton John, oui, oui, au piano. En somme, tout ce qui compose et composait le groupe états-unien dans les années 2010 et tout ce qui nous amenait à l’apprécier, dans une version cette fois-ci plus contemplative et émotive, parce qu’eux aussi ont pris en pleine gueule le même douloureux constat : ils ont vieilli avec nous.
“Pour être complètement honnête avec vous, j’ai fondu en larmes en studio, quand je chantais ‘Loss of Life’, le dernier morceau enregistré pour l’album”, a confié Andrew VanWyngarden à Vogue. Il faut dire que cet album s’est écrit durant le confinement, au moment où les deux membres entraient dans leur quarantaine et cet isolement forcé explique en grande partie les mélodies mélancoliques qu’on y trouve, cette tonalité un peu triste et angoissée qui accompagne chaque titre. Il explique peut-être même un peu son titre : “la perte de vie”. Mais peu importe, une fois le dernier titre atteint, Loss of Life nous rappelle qu’on a bien vieilli et qu’on est encore en vie.