Charli XCX : pourquoi la promo de son album BRAT devrait être étudiée en école de marketing

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Charli XCX : pourquoi la promo de son album BRAT devrait être étudiée en école de marketing

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© Instagram/Charli XCX

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Par Flavio Sillitti

Publié le

Un fond vert fluo, une typo éclatée, beaucoup de charisme et un rêve.

Mais qui est Charli XCX ? Voix du tube “I Love It” pour certain·e·s, reine du club pour d’autres et “millennial obsédée par l’an 2000, icône de la mode et talent pop notoirement sous-estimé” aux yeux du média Pitchfork, la Britannique a beau ne pas être la plus identifiée chez nous, son statut d’icône pop est aujourd’hui indéniable. Et l’effervescence autour de son sixième album, BRAT, prévu pour ce vendredi 7 juin, en atteste. Analyse d’un phénomène marketing que personne n’avait vu venir.

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Il faut dire qu’au moment de dévoiler la pochette du projet, en mars dernier, Charlotte Aitchison de son vrai nom n’avait pas fait l’unanimité. Le simple montage Photoshop qui constitue la pochette est tout ce qu’il y a de plus basique : un simple fond vert fluo, un grossier “brat” en lettres noires pixellisées, et c’est tout. De quoi soulever la question de la paresse et du manque d’inspiration des artistes et de leurs équipes. C’était sans savoir que cette pochette, aussi basique soit-elle, allait devenir le symbole de toute une communauté de fans, et inonder les timelines de nos plateformes connectées.

Après la sortie du premier single “Von dutch” en mars dernier, mais aussi de son clip barré tourné à l’aéroport Charles de Gaulle de Paris, la chanteuse a dégainé un rollout (anglicisme simplificateur pour “campagne promotionnelle”) aux petits oignons, qui ne cesse de nous bluffer par son efficacité, et qui s’éloigne fort heureusement des plans de départ soumis par le label de l’artiste, Atlantic Records (incluant sortir une sextape et s’afficher en robe de soirée dans le métro), et dont elle s’était moquée sur ses réseaux sociaux.

À la place, Charli XCX et ses équipes ont misé sur une stratégie à la fois organique et digitale, avec des happenings qui ont réjoui les fans (concerts surprises sur une plage barcelonaise, par exemple) et qui ont été massivement relayés sur les réseaux sociaux, rendant l’expérience “Charli XCX” plus cool que jamais. Si tu n’es pas au concert surprise de Charli XCX, mérites-tu vraiment la vie ? C’est ça, le mood.

S’en sont suivies des sorties en chaîne de singles plus alléchants les uns que les autres (à l’heure où les stars de la pop boudent tout simplement les sorties de singles), de clips en hommage à la pop culture connectée (on ne se remet pas de celui de “360”) et même d’un Boiler Room reconnu comme un “cultural reset”, faisant fusionner les scènes club et pop, incarnation même de ce que ce sixième album prétend être. Au-delà de ça, la chanteuse a sélectionné ses sorties médiatiques avec parcimonie, préférant des formats fun et décalés comme l’excellente Recess Therapy (qui consiste à laisser des enfants échanger avec les vedettes).

Des remix des singles ont également été partagés, conviant des icônes de la pop culture d’Internet autour de la table : Addison Rae, Yung Lean, et même Robyn. Pour se conformer à l’esthétique et la mentalité club de cet album, Charli s’est aussi collée à un mode de vie plus débridé que jamais, et pour l’avoir croisée à l’after-party Courrèges en pleine Fashion Week parisienne, on peut en attester : elle est vraiment la party girl qu’elle pense être. Dédiée à la cause.

À force, l’esthétique et l’influence BRAT (qui se traduit par “peste” ou “gamine de merde”, pour faire simple) ont gagné du terrain, et le public cible de la chanteuse n’a pas pu y échapper. Le vert fluo de la pochette est devenu une référence en elle-même, et tous les objets et manifestations de cette couleur dans le quotidien des fans sont devenus un prétexte pour chantonner “I’m just living that life, Von dutch” à tue-tête. Même les marques s’y mettent, à l’instar de Burger King ou Uber, pour changer leur logo en vert fluo ou faire des références à la sortie du disque.

Pour les fans de la première heure, cet album est plus attendu que les précédents pour une raison toute simple : Charli XCX est plus en phase avec elle-même que jamais. À savoir une petite peste, avec une attitude je-m’en-foutiste qui fait forcément sourire, et qui colle parfaitement au mood de la campagne, et qui justifie notamment l’esthétique simpliste de la pochette, qui aura finalement révélé son plein potentiel dans les semaines qui ont suivi.

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Les T-shirts “brat” se multiplient, le vocabulaire des morceaux s’intègre au champ lexical de toute personne qui y a jeté une oreille, symptômes d’une campagne qui a bien pris. La dernière fois qu’un album avait suscité un tel engouement, comme l’ont relevé plusieurs amateur·rice·s de pop culture sur les réseaux, c’est le MOTOMAMI de Rosalía dont l’impact culturel n’est plus à prouver. “À l’époque, tout le monde voulait devenir une motomami. Aujourd’hui, tout le monde veut être une brat”, nous partage un Charli’s Angel investi.

“Je pense que cette campagne est bonne parce qu’on est vraiment couillus et concentrés sur chaque détail. J’ai eu des discussions d’une heure sur le positionnement des polices de caractères ou sur ce que j’allais poster sur ce p*tain d’Instagram… Il n’y a pas de place pour la médiocrité, comme c’est le cas avec d’autres campagnes pop en ce moment”, partage la chanteuse, confiante, au média GQ. L’album BRAT de Charli XCX sera disponible ce vendredi 7 juin.