Il y avait quelque chose d’étrange ce dimanche 3 novembre à La Défense Arena de Paris, alors que 40 000 spectateurs se réunirent pour célébrer un groupe qu’a priori personne ne pensait revoir sur scène à peine trois mois plus tôt.
Lorsque Linkin Park annonça son retour en grande pompe début septembre, les fans du monde entier furent surpris devant le choix d’Emily Armstrong pour reprendre le micro de Chester Bennington, qui s’était suicidé en 2017.
L’ex-chanteuse du groupe Dead Sara avait un vide immense à combler, certains disaient même impossible, mais devant l’efficacité du single “The Emptiness Machine”, force était de constater que son choix était potentiellement le bon, en ne cherchant pas à copier absolument la voix caractéristique et si emblématique de Bennington, mais plutôt en emmenant le groupe dans une nouvelle direction, compatible avec ses anciens tubes et propice à en pondre de nouveaux.
Et en attendant le nouvel album From Zero, prévu le 15 novembre prochain, le groupe s’est offert une petite série de dates événements, l’occasion de voir si cette nouvelle alchimie prend sur scène.
Une chose est sûre : les fans sont toujours là, en témoigne une salle complète en quelques minutes lors de la mise en vente, avec bon nombre de frustrés sur Internet qui n’ont pas eu la chance d’acquérir leur billet pour le retour tant attendu et redouté du groupe américain.
Si certains avaient encore quelques doutes sur cette nouvelle formation du groupe, avec aussi un nouveau batteur derrière les fûts, l’enthousiasme était palpable dès l’introduction sur “Somewhere I Belong”, toutes les tribunes se levant d’entrée de jeu pour rattraper comme il se doit les sept ans d’attente.
Et tout de suite, une évidence : Linkin Park est bel et bien de retour, comme s’ils n’avaient jamais quitté la scène.
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Emily relève le défi
En enchaînant direct quatre morceaux des deux premiers albums mythiques du groupe (“Somewhere I Belong”, “Crawling”, “Points of Authority” et “Lying From You”), les musiciens menés par Mike Shinoda semblaient mettre un point d’honneur à rappeler que Linkin Park reste le groupe que les gens aiment tant, les tubes ayant fait sa renommée étant toujours là.
Alors évidemment, tous les yeux, et les oreilles, étaient rivés sur Emily Armstrong, qui voguait de part et d’autre de la scène comme un électron intenable qui semblait jauger la scène et la salle.
Et l’évidence : elle est à sa place. Aussi bien dans les parties mesurées et posées que dans les envolées sauvages et criardes, la chanteuse déroulait les chansons avec aisance, comme si elles avaient été enregistrées pour sa voix, se les réappropriant sans la moindre hésitation.
À tel point qu’il ne faudra pas attendre plus longtemps pour entendre déjà le public scander “Emily ! Emily ! Emily !”, la concernée semblant elle-même surprise d’une réponse aussi rapide et enjouée.
Il y a bien quelques moments où elle semblait un peu plus en retrait, mais on imagine bien que se retrouver propulsée à la tête d’une telle machine ne doit pas être chose aisée.
Si le morceau “New Divide”, issu de la bande originale de Transformers 2: la Revanche (!), n’est pas accueilli avec autant d’entrain que les précédents, le fameux nouveau single “The Emptiness Machine” fera l’effet d’une petite bombe dans la salle, comme si cette chanson avait déjà sa place parmi les plus connues du groupe, avec un public qui fera tout pour mettre ce nouveau line-up en confiance.
La puissance de la polyvalence de Linkin Park
Après un interlude vidéo, les festivités reprirent avec des morceaux plus récents, et globalement le groupe a eu le mérite d’en donner pour tous les goûts, piochant allègrement dans ses cinq premiers albums au long des 2 heures de concert, et offrant à Paris la première en live de son nouveau single “Over Each Other”, l’occasion de mettre en valeur la voix d’Emily Armstrong sur un registre plus posé et pop.
D’ailleurs, le plus surprenant devant cette énorme salle pleine à craquer, c’était la diversité musicale offerte par le groupe. Il y eut évidemment quelques chansons pop-rock accessibles à tous, des ballades et de quoi pousser le public à illuminer la salle avec ses téléphones, mais Linkin Park reste aussi l’un des fers de lance du nu metal et du rock alternatif, mélangé à un phrasé plus rap, ce que le groupe ne manqua pas de rappeler à travers quelques saillies puissantes, de “One Step Closer” à “Numb” en passant par les méga tubes “In The End”, ou “Faint”, qui enflammèrent la salle pour de bon, le public reprenant les paroles sans problème, même si l’ambiance restait bon enfant, sans grand mouvement de foule, ni le moindre pogo dans la fosse.
Une page de tournée, regard vers l’avant
Au milieu de cette fête certes bien rodée et réglée comme du papier à musique, il y avait Mike Shinoda, l’autre leader du groupe. Son sourire ininterrompu, ainsi que ses remerciements au public quant à son accueil de ce nouveau chapitre du groupe, ne trompaient pas : lui qui pensait peut-être le premier que Linkin Park était fini en 2017 semble plus ravi que jamais d’être toujours sur scène en 2024, et que les gens soient toujours là pour embrasser leur musique.
Si bien que tout a été fait dans la soirée pour ne pas interrompre la bonne humeur du moment.
Ainsi, le nom de Chester Bennington n’a même pas été cité, aucun hommage n’a été rendu : Linkin Park va de l’avant, et écrit une nouvelle page de son histoire sans évoquer la tragédie qui a failli l’arrêter.
Certains trouveront ça irrespectueux, d’autres pudique, toujours est-il que tout le monde semblait heureux d’être là pour accompagner le groupe vers l’avenir, et devant l’enthousiasme général, il y a fort à parier que ce nouveau chapitre sera de longue durée tant on a assisté à la représentation d’une machine de guerre qui semble ne jamais avoir été en pause, et qui a déroulé son show comme si elle n’était jamais partie.
Qui sait, Chester Bennington serait sûrement fier de ses camarades.
Et pour les plus grands fans, vous serez ravis de retrouver ici la setlist du concert :
Intro
1. “Somewhere I Belong”
2. “Crawling”
3. “Points of Authority”
4. “Lying From You”
5. “New Divide”
6. “The Emptiness Machine”
Interlude Creation
7. “The Catalyst”
8. “BURN IT DOWN”
9. “Waiting for the End”
10. “CASTLE OF GLASS”
11. Joe Hahn Solo
Interlude Empty Spaces
12. “When They Come for Me” / “Remember the Name” (Mike solo)
13. “Over Each Other”
14. “LOST IN THE ECHO”
15. “Given Up”
16. “One Step Closer”
Interlude Collapse
17. “Lost” (Mike et Emily en duo au piano)
18. “Breaking the Habit”
19. “What I’ve Done”
Interlude Kintsugi
20. “Leave Out All The Rest”
21. “My December” (acoustique)
22. “Friendly Fire”
23. “Numb”
24. “In the End”
25. “Faint”
Rappel :
26. “Papercut”
27. “Heavy Is the Crown”
28. “Bleed It Out”