L’épisode spécial de Doctor Who attaqué par des trolls pour avoir introduit un personnage transgenre

L’épisode spécial de Doctor Who attaqué par des trolls pour avoir introduit un personnage transgenre

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Par Delphine Rivet

Publié le

Le review bombing n’a heureusement pas empêché la série de battre un record d’audience sur la BBC.

Les œuvres se suivent et l’Histoire se répète. La dernière victime en date de review bombing — le nouveau sport préféré des masculinistes et de l’extrême droite qui consiste à mettre intentionnellement une mauvaise note en ligne pour fausser le score d’un programme — c’est l’épisode spécial de Doctor Who, “The Star Beast”. En cause, l’insupportable présence (à leurs yeux) d’un personnage transgenre à l’écran.

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Cette année, Doctor Who, véritable institution outre-Manche, fête ses 60 ans. La série de science-fiction de la BBC, dont le personnage principal est un alien, un seigneur du temps, avec deux cœurs qui battent dans sa poitrine et qui peut changer d’interprète à chaque “régénération”, a bercé plusieurs générations d’Anglais·es. Voir une œuvre évoluer avec son époque sur plusieurs décennies, c’est rare. Et donc précieux.

Mais cet épisode diffusé le 25 novembre sur la BBC (et dans le reste du monde, dont la France, sur Disney+), qui signait le grand retour de l’Écossais David Tennant, dixième incarnation du Docteur, et de Catherine Tate dans la peau de Donna Noble, a autant ravi les fans et la presse qu’il a énervé les trolls. L’histoire introduit en effet le personnage de Rose Noble (campée par la jeune actrice trans Yasmin Finney), la fille transgenre de Donna, qui a un rôle essentiel dans la résolution de l’intrigue. Plusieurs lignes de dialogues évoquent aussi la non-binarité et la transidentité, ainsi que l’usage des pronoms.

Pour la fachosphère et autres transphobes, c’en est trop. Leur réponse, comme à chaque fois qu’une œuvre ne leur convient pas, c’est donc le review bombing. L’excellent score critique de l’épisode de 90 % sur Rotten Tomatoes se voit ainsi opposer un score public de 42 %, avec plus de 250 votants, suite à leur campagne de dénigrement massif. Sur les réseaux sociaux, ils appellent aussi au boycott à base de hashtags du type #RIPDoctorWho.

Avant Rose Noble, ils s’étaient indignés contre l’annonce de Ncuti Gatwa, acteur noir et queer révélé par Sex Education qui reprendra le rôle-titre de Doctor Who dans la prochaine saison. Et encore avant, c’est le choix de Jodie Whittaker, première femme en plus de 50 ans à incarner le Docteur, qui les avait fait enrager.

Mais Russell T Davies, showrunner de la série de 2005 à 2010, et qui rempile en 2023, a pour la première fois verbalisé, avec cet épisode, le fait que le Doctor est en réalité une incarnation de la non-binarité : “Masculin et féminin. Et aucun des deux. Et les deux à la fois.”. Andy Pryor, le directeur de casting est venu ajouter son grain de sel :

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“Joyeux dimanche. Je passe juste pour dire que sur Doctor Who (ou n’importe quelle autre production), on ne se donne pas autant de mal pour caster de façon inclusive juste pour faire un coup de pub. On le fait parce qu’on aime raconter des histoires. Et les histoires devraient parler à tout le monde, et inclure tout le monde. Donc si une seule personne se sent un peu moins seule…”

Puisque les agrégateurs de critiques sont aussi facilement manipulables, mieux vaut se fier vers à des données plus fiables pour mesurer le succès ou non d’une œuvre. Dans le cas de cet épisode spécial de Doctor Who, les faits sont têtus : c’est le meilleur lancement de série de l’année sur la BBC, avec 5,08 millions de téléspectateur·rice·s devant leur poste. Il faudra ajouter à cela, dans quelques jours, les chiffres de la plateforme BBC iPlayer, et ceux de Disney+, qui diffuse la série dans le reste du monde, et où “The Star Beast” occupe le Top 5 presque partout.