Vieille âme, Axel Ravier enseigne, recherche, milite, pense le monde de demain

Vieille âme, Axel Ravier enseigne, recherche, milite, pense le monde de demain

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Par Donnia Ghezlane-Lala

Publié le , modifié le

"Je veux leur montrer qu’on peut être noir, gay, des quartiers populaires, et devenir sociologue."

Depuis plus de 15 ans, Konbini va à la rencontre des plus grandes stars et personnalités de la pop culture dans le monde entier, celles et ceux qui nous font rêver au quotidien à travers leur passion, leur détermination et leurs talents, afin de vous livrer tous leurs secrets.

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La fiche d’identité d’Axel Ravier, 24 ans, doctorant en sociologie et militant

  • Lieu de l’interview ? La Fontaine, 31-33 rue Juliette Dodu, Paris.
  • Son signe astro ? Lion.
  • Le meilleur moment de son année 2022 ? Commencer à enseigner et l’émotion de ses parents quand il a obtenu son contrat doctoral, fin mai 2022, pour commencer sa thèse.
  • Comment il aborde 2023 ? De manière studieuse et militante.
  • Son Goncourt du cœur ? De purs hommes, de Mohamed Mbougar Sarr.

“On me dit souvent que j’ai une vieille âme.

Portrait. Déformation professionnelle oblige, Axel Ravier aime prendre son temps. Il prend son temps pour répondre, pour réfléchir, pour trouver ses mots, pour lire, pour penser, pour rechercher, pour militer. Notre entretien a duré trois heures. C’est plus longtemps qu’un ou deux verres, à tel point qu’on a fini par commander des desserts pour accompagner son livre de chevet qui trônait sur la table : Intersectionnalité, de Patricia Hill Collins et Sirma Bilge.

Son parcours ne donne pourtant pas à voir un éloge de la lenteur. À 24 ans, Axel Ravier est déjà doctorant en sociologie, entame sa thèse, enseigne à l’université et est porte-parole d’une association militante. Il renvoie l’image d’un homme qui n’a pas le temps, qui file, qui trace, qui n’a pas son âge. “On me dit souvent que j’ai une vieille âme”, sourit-il quand je lui demande s’il a sauté des classes, perplexe face à ses 24 ans et à la rapidité de son parcours.

“La Pride des Banlieues a été mon déclic militant.”

En 2022, vous avez forcément entendu parler de lui. D’abord à travers la Pride des Banlieues, dont il fait partie depuis 2021 en tant que responsable politique puis porte-parole. La Pride des Banlieues a été créée en 2018 par l’association Saint-Denis Ville Au Cœur. Elle voulait d’abord s’emparer des questions locales, puis a décidé d’axer davantage son action sur les droits des communautés LGBTQIA+.

L’association a frappé fort en organisant sa première Pride en 2019. En 2022, elle a brillé avec sa deuxième Pride, réunissant 10 000 personnes dans les rues de Saint-Denis. D’événement satellite en événement satellite, l’initiative s’est fait connaître d’un public plus large, prouve que “les quartiers populaires font des choses”, œuvre à contredire les idées reçues sur la banlieue. Elle prévoit une prochaine Marche des Fiertés en juin 2023.

“La Pride des Banlieues a été mon déclic militant. Avant ça, je ne me sentais pas légitime, je pensais que je n’avais rien à apporter. Je faisais mes études dans mon coin, et j’avais l’impression qu’on ne comprendrait pas ma bizarrerie”, raconte le jeune doctorant qui parle assez facilement de sa psychanalyse et aspire à sensibiliser davantage aux questions liées à la santé mentale.

“À la base, je bossais sur mes recherches et je les ai contacté·e·s. On s’est rencontré·e·s, j’allais à leurs événements, mais j’y participais à distance, en tant que chercheur et membre extérieur.” Le monde militant lui faisait peur, rejoindre un collectif l’effrayait. “J’étais quelqu’un de très solitaire. Puis, on a fini par me reconnaître à chaque événement. À la fin, j’y allais par plaisir et non plus seulement pour mes recherches. Mon rôle de chercheur a apporté au mouvement, mais le mouvement a aussi apporté à mes recherches. Plus tard, on m’a proposé de les rejoindre. J’ai accepté, d’abord en tant que responsable politique puis en tant que porte-parole”, poursuit-il.

En 2022, vous l’avez ensuite lu dans cette tribune de Mediapart où il réfute “l’enfer gay” en banlieue que nos médias adorent dépeindre “sous le prisme de la religion et de l’islamophobie”. “Ce qui m’agace, c’est comment on traite cette homophobie : ‘L’homophobie, c’est la banlieue et l’islam.’ Non, l’homophobie, c’est aussi le Marais, la Manif pour tous…”

Et, enfin, vous l’avez aussi vu dans un reportage d’Arte et dans l’interview filmée que nous avons publiée où il détaille son domaine de recherche, revient sur le traitement médiatique de l’homophobie en banlieue. Une année faste bien et une exposition médiatique que le concerné a très bien vécues, reconnaissant de la bienveillance des journalistes qui ont croisé son chemin. “J’ai quand même toujours peur de pas être clair, que mes propos soient mal saisis, mais je suis toujours fier quand je me rends compte que j’ai touché des gens, tenu un discours, apporté de la nuance, aidé des personnes.”

“L’amphi, c’est aussi une scène de théâtre, on ne peut pas enseigner sans être soi.”

Ses élèves lui ont parlé de ses passages dans les médias. Ses nouvelles rencontres l’identifient parfois comme “le mec de la vidéo Konbini”. “Je suis discret, mais j’aime la lumière et la scène, surtout pour faire porter des choses qui me tiennent à cœur. L’amphi, c’est aussi une scène de théâtre, on ne peut pas enseigner sans être soi. Je fais mes cours, je fais des blagues, je suis franc, je dis ce qui me passe par la tête.”

Et Axel Ravier compte bien fouler longtemps les amphithéâtres d’université. “C’est une chance” d’avoir saisi si vite sa vocation. “La sociologie, j’en ferai toute ma vie”, assure-t-il sans l’ombre d’une hésitation, d’un doute, aucune. “Quand j’ai donné mon premier cours, j’ai compris que je voulais faire ça toute ma vie.”

Fils d’un maçon martiniquais et d’une mère “qui a fait les ménages dans les écoles, puis a évolué en employée de mairie”, le chercheur qui a grandi à Livry-Gargan, au sein d’une famille recomposée, a obtenu son bac ES en 2016, dans un lycée de Chelles, dans le 77. Au moment où il me dit que son père était maçon, je lui avoue qu’il y a quelque chose de beau dans le fait que son père construise la ville, pendant que lui la pense.

Couverture d’Intersectionality, de Patricia Hill Collins et Silma Bilge, le livre qu’Axel Ravier lisait dans le café, avant que je le rejoigne.

“Pour mes parents, j’étais le philosophe chiant.”

“Je voulais devenir prof de SES au lycée, mais j’ai découvert la philosophie en terminale, et ça m’a donné envie de faire une bi-licence sociologie-philosophie à la Sorbonne”, narre-t-il en précisant qu’il est un des rares membres de sa famille à avoir fait de longues études.

Enfant, Axel Ravier n’avait pas d’idole, mais il écoutait Whitney Houston, “une gay icon” suprême et du zouk, lisait Baudelaire, s’imprégnait d’une “culture très TV” : H, Les Visiteurs, Le Père Noël est une ordure, Charmed, Ma famille d’abord… Il se définissait comme un “gamer solitaire” accro aux jeux de simulation comme Empire Earth, où il faut construire des villes (on y revient…), et aux jeux de guerre.

“J’ai eu un ordinateur très tôt, ma chambre était mon cocon. Pour mes parents, j’étais le philosophe chiant. J’étais bon élève mais pas trop, j’avais une image ‘d’intello pas intello’. J’ai porté des lunettes jeune, même si je n’en avais pas encore besoin. Ça me permettait de me cacher, de calmer ma dysmorphophobie.” Il se définissait aussi comme un “enfant peureux qui ne comprenait rien aux relations amoureuses”.

“J’étais délégué de classe et dans mon lycée, on m’appelait ‘Président’.”

“J’ai vite saisi que j’aimais les hommes. J’ai rencontré mon premier copain via un groupe de gaming dédié à Minecraft, un jeu de construction. Tout le monde savait que j’étais gay, même quand j’ai demandé à une fille de ma classe si elle voulait sortir avec moi. Personne n’a compris !”, s’esclaffe-t-il avec “Sweet Caroline” qui joue en fond, dans le café, et qui me ramène à mes propres années adolescentes passées devant Glee.

Capture d’écran du jeu Empire Earth.

“J’étais délégué de classe et dans mon lycée, on m’appelait ‘Président’, car j’étais proche des comités de vie lycéenne”, continue-t-il pour compléter le tableau vivant de son enfance. Il comprend rapidement que c’est “là” qu’on peut faire bouger les lignes. À la fac, il “garde ce même esprit”, il incarne le “chelou mais franc, qui dit les termes”, donc on ne se “frottait” pas trop à lui.

Peu à peu, grâce à sa thérapie, il parvient à nouer des relations à la fac, qui demeurent importantes, aujourd’hui encore. À propos du personnage qu’il incarnait, Axel Ravier concède qu’il avait à l’époque honte d’où il venait. “Puis j’en ai fait une fierté. À l’enfant et l’ado que j’étais, je dirais : ‘Continue d’être qui tu es, ça fait souffrir, mais tu seras très content du résultat’.” Très vite, ses notes à la Sorbonne l’amènent à une évidence : ce sera la sociologie.

“La sociologie m’a permis de me comprendre, de comprendre les inégalités sociales, de comprendre le monde.”

“Ça m’a permis de comprendre les inégalités sociales, et mon vécu et les troubles psychologiques que je traversais. La première notion qui m’a introduit à la sociologie, c’est la socialisation : quels sont les processus qui vont nous mener à aimer telle chose, à se comporter de telle manière. Enfin, j’avais une chose à laquelle je pouvais me rattacher ! Ça m’a permis de me comprendre, de comprendre le monde, pourquoi les gens se mettent en couple, créent des familles, pourquoi certain·e·s font leurs courses à Naturalia, et d’autres à Carrefour”, se souvient le militant.

On évoque nos mères et les compétences mémorielles propres aux classes populaires, capables de se souvenir de tête des prix exacts, au centime près, des produits vendus dans des magasins de hard discount comme Cora, Action ou Lidl. Il cite Colin Giraud, les travaux autour des ghettos noirs de W. E. B. Du Bois, auteur des Noirs de Philadelphie et premier Africain-Américain à obtenir un doctorat en histoire à Harvard. Et Bourdieu, évidemment, même si “c’est cliché”. “Bourdieu a dit : ‘La sociologie est un sport de combat’. C’est une phrase qui m’a marqué.”

Portrait de W. E. B. Du Bois, auteur des Noirs de Philadelphie et premier Africain-Américain à obtenir un doctorat en histoire à Harvard, 1907. (© James E. Purdy/Adam Cuerden/National Portrait Gallery)

Durant ses études supérieures, Axel Ravier se renseigne sur l’ENS, où on forme les chercheur·se·s. “J’ai passé l’examen via des concours universitaires qui y donnent accès. J’étais admissible la première fois et admis la seconde. J’ai tenté Lyon, Ulm et Saclay, et j’ai eu Saclay”, continue-t-il en se rappelant avec nostalgie la première fois qu’il a franchi le périphérique. “Je n’avais jamais entendu parler des classes préparatoires et la fac m’a ouvert tellement de portes. Durant mes études, je suis parti à l’étranger, à Lausanne, où j’ai rencontré mon codirecteur de thèse, Sébastien Chauvin.”

“La sociologie, j’en ferai toute ma vie.”

Dès ses 22 ans, Axel Ravier se retrouve à travailler avec son codirecteur de thèse sur un ouvrage. L’étudiant retourne ensuite à Paris pour entamer un Master d’études de genre, à l’École des hautes études en sciences sociales. “J’y ai rencontré ma codirectrice de thèse Élise Palomares, car il me fallait une chercheuse française, Sébastien Chauvin étant suisse. Elle est si importante pour moi, il faudra la citer dans ton article.” C’est chose faite.

En dehors de ses heures de cours donnés dans une université de Rouen, Axel Ravier consacre le reste de son temps à ses recherches et à la Pride des Banlieues : “Mon rôle de chercheur me permet d’avoir une double casquette : le chercheur peut s’immiscer sur le terrain et le militant, agir sur le terrain.”

Au premier semestre, l’enseignant dispensait un cours de sociologie générale et aujourd’hui, il tient un cours de sociologie urbaine, autour des ségrégations dans la ville, de la place des minorisé·e·s, des processus d’exclusion des individus, en gardant une grande liberté. “Les villes, qu’elles soient grandes ou petites, concernent tous les élèves.” Dans ses cours magistraux à Rouen, beaucoup d’étudiant·e·s sont issu·e·s des classes populaires ou des immigrations africaines.

“Il m’a fallu du temps pour m’approprier ce milieu gay et ses codes.”

“Je veux leur montrer qu’on peut être noir, gay, des quartiers populaires, et devenir sociologue, enseigner ce genre de sujets. Je veux montrer qu’il y a différents vécus LGBTQIA+, ce que c’est que de grandir en tant que gay en cité, en tant que gay en cité qui va à Paris, en tant que gay noir de cité qui va à Paris, etc. […] Une de mes élèves a répondu à un sondage sur mon cours et a confié que je lui avais redonné confiance en elle, que mon cours lui sera utile. Quelle fierté de lire ça : j’ai servi à quelque chose”, nous confie-t-il avec émotion.

Côté recherche, Axel Ravier partage l’intitulé exact de sa thèse : “Homosexualité et classes populaires : une approche par les modes de vie”, dans laquelle il s’intéresse “aux personnes qui couchent avec des hommes et vivent dans les grands ensembles mais qui ne se définissent pas comme gays”. Un sujet dans la continuité de son mémoire, qui lui prendra ses quatre prochaines années. “Je suis ravi que l’État français me paie pour travailler sur ce sujet”, s’exclame-t-il. “Après ça, j’aimerais sortir des articles et des essais.”

Mais avant ça, Axel Ravier profitera. Il profitera de son temps, de ses années universitaires, s’accordera une jeunesse. “Je suis une vieille âme mais je me découvre une jeunesse. […] Le milieu gay parisien est très blanc, je n’ai jamais fréquenté les boîtes de nuit avant très récemment. Je ne m’y sentais pas à l’aise, je ne m’y reconnaissais pas. J’ai toujours été très casanier, je sortais sur Paris pour aller au cinéma à Châtelet, et il m’a fallu du temps pour m’approprier ce milieu gay et ses codes.”

“La race ne me semblait pas être le problème, je mettais ça sur le compte de mon malaise social. Je me suis rendu compte assez tardivement, que la race jouait beaucoup : tu peux être autant utilisé que mis à l’écart.”

Le chercheur se souvient que son arrivée à la fac l’a confronté au fossé socioculturel entre Paris et ses banlieues : “Avant, la race ne me semblait pas être le problème, je mettais ça sur le compte de mon malaise social. Je me suis rendu compte assez tardivement, que la race jouait beaucoup : tu peux être autant utilisé que mis à l’écart. Je vis à Aubervilliers aujourd’hui, mais avant, je vivais à Livry-Gargan. Les boîtes étaient inaccessibles pour moi, géographiquement, avec le RER… On se sent prisonniers. Ça a vachement impacté mon évolution en tant qu’homme gay noir de banlieue, même si je portais des desert boots”, analyse-t-il en me montrant, fièrement, ses baskets aux pieds, “les premières” qu’il n’ait jamais achetées.

“Durant mes études, je mettais des costumes, j’étais décalé. […] Porter des desert boots et des costards permet de défier les clichés racistes”, poursuit-il. Le vêtement est un outil, une arme en société, pour les personnes racisées. De l’image que l’on renvoie, notre discussion embraie sur la question de la représentativité dans les milieux LGBTQIA+. “Gagner en visibilité est un privilège. Il y a des gens qui ne peuvent pas être visibles, pour des questions familiales. Ça demande des adaptations avec sa culture, sa famille, des ressources sociales. Mes parents étaient OK avec ma sexualité, ça s’est rapidement délié. J’ai cette chance de pouvoir être visible.”

“Gagner en visibilité est un privilège.”

C’est un point important pour la Pride des Banlieues : “On veut montrer qu’on peut être gays et ne pas faire son coming out, qu’on peut être gays et ne pas vouloir être visibles, qu’on peut être gays et ne pas avoir le même vécu, notamment concernant la prévention et l’accès aux soins.” Subitement, le sociologue revêt sa casquette de porte-parole militant devant mes yeux :

“Notre rôle, c’est d’apporter un autre discours pour compléter le tableau. Notre revendication pour 2023, c’est la PMA pour tou·te·s, parce que les personnes trans en sont exclues mais aussi les personnes racisées, car elles ne peuvent faire une PMA qu’avec des ovocytes de personnes racisées, n’avoir que des enfants qui leur ressemblent, ne peuvent pas avoir des enfants blancs. Malheureusement, il y a statistiquement moins de personnes racisées qui font des dons. Et ça crée des inégalités d’accès à la PMA.

Il y a aussi des personnes tout à fait saines qui n’ont pas accès à la PMA parce qu’elles traversent des troubles psychologiques ou parce qu’elles sont victimes de grossophobie. Cette revendication dépasse nos frontières. L’union fait la force, et on espère que ça rallierait d’autres associations à la cause”, déclare-t-il en énumérant les autres objectifs fixés par l’association, ces années passées, comme “les questions sociales, l’aide au logement, le logement d’urgence pour les personnes LGBTQIA+ sans domicile, les agent·e·s à former, l’écologie, la santé, travailler main dans la main avec d’autres associations des quartiers”.

“C’est normal que la société mette du temps à changer. C’est en luttant qu’on y arrivera.”

“La visibilité est toujours une question, même dans les milieux LGBTQIA+ mais à quel prix ?” Au prix du capitalisme, du pinkwashing, du queerbaiting, pour faire de l’argent. “Ce sont des questions assez complexes : quelle visibilité on veut ? Aujourd’hui, on a l’impression de savoir beaucoup de choses, de maîtriser beaucoup de sujets, mais, il faut aussi accepter que les choses prennent du temps”, critique-t-il en remettant sa casquette de chercheur.

“C’est normal que la société mette du temps à changer. C’est en luttant qu’on y arrivera. Je garde espoir que c’est dans le dialogue qu’on changera les choses. Il ne faut pas détruire, casser radicalement les institutions. Je suis d’accord avec cette posture, mais je pense aussi qu’on peut les transformer de l’intérieur. Je m’inquiète juste de la façon dont les personnes qui nous gouvernent gouvernent.”

Mais “le temps, c’est aussi quelque chose qui est socialement situé”, et Axel Ravier est conscient de son privilège. “J’ai le temps de prendre ce temps, j’ai un contrat doctoral qui me permet de me consacrer à ma thèse et à l’enseignement, d’être moins stressé, de ne pas avoir à trouver un job à côté pour payer mes factures à la fin du mois. C’est facile pour moi de dire qu’il faut prendre le temps. Les personnes qui peuvent prendre le temps doivent défendre les personnes qui ne le peuvent pas, et qui sont totalement enterrées par les obligations sociales, économiques et familiales.” Du temps, il lui en faudra. Il nous en faudra. Il en faudra.

© Donnia Ghezlane-Lala/Konbini

Les recos d’Axel Ravier

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