Pourquoi l’effacement d’une œuvre taguée sur un mur de Londres fait débat ?

Pourquoi l’effacement d’une œuvre taguée sur un mur de Londres fait débat ?

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Capture d’écran de la BBC

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Par Lise Lanot

Publié le , modifié le

Lorsqu’il a tagué un mur de Brick Lane au début du mois d’août, l’artiste chinois Yi Que ne se doutait sans doute pas de l’escalade qui allait s’ensuivre.

Alors que la nuit tombait sur l’Est londonien le 4 août dernier, l’artiste Yi Que (Wang Hanzheng dans le civil) menait une “action artistique” sur le mur d’un entrepôt. Aux côtés de “trois amis Chinois vivant en Grande-Bretagne” et avec “l’aide et les participations directes ou indirectes d’une vingtaine de personnes”, l’artiste a tagué en lettres rouges “douze valeurs” inscrites dans le Parti communiste chinois : “démocratie”, “prospérité”, “civisme”, “harmonie”, “liberté”, “égalité”, “justice”, “État de droit”, “patriotisme”, “dévouement”, “intégrité” et “amitié”.

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Arguant sur son site que le “bon art” est le “moyen le plus simple et le plus direct vers l’esprit des gens afin de remuer et créer des réflexions”, Yi Que décrit sa performance comme un “acte martyr et courageux”. La performance est supposée agir comme un “rappel silencieux des oppressions aux libertés de pensée, de la presse et d’expression qui sont toujours d’actualité en Chine en 2023”, a-t-il décrit au Guardian.

Les signes chinois, inscrits en rouge sur un mur blanc, sont devenus la base d’une œuvre collective truffée de messages politiques tels que “Free Taiwan”, “Free Tibet”, “Free Uyghurs” et de références au massacre de Tiananmen de 1989. L’amoncellement de graffitis a beaucoup plu à l’artiste, bien qu’il soit vite devenu la cible de “menaces de mort accompagnées de [son] adresse personnelle”, relate-t-il.

Effet Streisand

En réponse aux revendications inscrites sur le mur, le syndicat responsable de l’entrepôt a recouvert de peinture les écritures et exigé une amende de 50 livres sterling à Yi Que. Voir disparaître des œuvres anti-censure a causé un bel effet Streisand (lorsqu’un phénomène est surdiffusé après qu’on a tenté de le dissimuler) autour de l’œuvre et permis à l’artiste de souligner le paradoxe des systèmes politiques, de la Chine au Royaume-Uni : “On ne peut résoudre le problème du totalitarisme grâce à des moyens totalitaristes.” L’œuvre de Yi Que, à l’origine acte de résistance envers les répressions du système chinois, s’est ainsi mue en document de réflexion sur les potentielles limites des libertés créatives et d’expression à travers le monde.