Comment raconter la vie en Palestine depuis le 7 octobre 2023 quand les “journalistes [sont] ciblés et tués, les rédactions détruites, Internet et l’électricité coupés, la presse étrangère bloquée”, tel que le rapporte Reporters sans frontières ? Comment savoir ce qui se passe à Gaza quand l’accès à Internet y est régulièrement coupé ? Afin de partager “la réalité à Gaza” et donner directement la parole aux concerné·e·s, le cinéaste palestinien Rashid Masharawi présente ce mardi 28 janvier à l’Institut du monde arabe From Ground Zero, From Ground Zero, Histoires inédites de Gaza, une série de 22 courts-métrages réalisés à Gaza “après les attaques du 7 octobre 2023 [par] 22 cinéastes gazaouis, afin de raconter les histoires inédites de la guerre actuelle par le biais du cinéma”.
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“Chaque film, d’une durée de 3 à 7 minutes, présente une perspective unique sur la réalité actuelle à Gaza. En utilisant un mélange de genres (la fiction, le documentaire, le docu-fiction, l’animation ou encore le cinéma expérimental), From Ground Zero offre une riche diversité de récits qui reflètent la tristesse, la joie et l’espoir présents dans la vie gazaouie”, relate l’Institut du monde arabe.
© Fonds Masharawi pour les Films/Cinéastes de Gaza/Coorigines Production
Les courts-métrages racontent ce que les gros titres et les dépêches AFP ne laissent pas toujours la place de voir : les queues aux toilettes publiques, les nuits “entassés dans des tentes”, “la destruction, la ruine et la mort [qui] consument tout autour”, tel que le rapporte la cinéaste Reema Mahmoud dans son documentaire Selfies, qui ouvre From Ground Zero : “J’aimerais partager avec toi mon quotidien […]. Il est 6 heures du matin et je n’ai pas fermé les yeux. Mon corps est fatigué à cause du bruit des avions, des roquettes, des ambulances et même du son de mes pensées, du sentiment qu’un danger peut nous toucher, mes amis, mes proches et moi.”
Des aspects parfois oubliés ou mis à l’écart du quotidien des Palestinien·ne·s sont mis en avant dans les films, qu’il s’agisse de difficultés “pratiques” telles que les pénuries d’eau ou les groupes de charges de téléphone improvisés (dans The Teacher, de Tamer Nijim, entre autres) mais aussi des problématiques liées à la santé mentale par exemple (“Nous avons tous besoin d’une thérapie pour supporter toute la douleur. Personne ne va bien” dans Offerings de Mustafa al Nabih ; “Qu’est-ce qui est plus lourd que ma tristesse ?” dans Overburden d’Ala’a Islam Ayoub). Chacun à leur façon, les films rapportent des voix silenciées, des vies bouleversées et, évidemment, la mort qui plane au-dessus de tous et toutes : “On a perdu beaucoup de proches, des amis, de la famille, un père. Ce qui est le plus douloureux, c’est que ce ne sont que des numéros. Nous, on sait qu’ils ont un passé, des rêves, une vie et un futur. Mais quand les infos arrivent, on nous dit 100, 200 martyrs, une famille décimée. Des numéros. Aucune attention aux êtres humains.” (Offerings de Mustafa al Nabih.)
From Ground Zero, Histoires inédites de Gaza, produit par Masharawi Fund For Films & Filmmakers in Gaza, Coorigines Production, sera présenté le mardi 28 janvier à l’Institut du monde arabe.